miércoles, 5 de junio de 2013

SEGONA PELL / DAME PLACER



Mañana día 6 de junio llega a las librerías SEGONA PELL. 
Versión en catalán de la novela que en 1999 publiqué con el título DAME PLACER.
 Incluyo aquí el texto que apareció en Le monde des livres tras la publicación de la novela en francés:


LE MONDE DES LIVRES - Littératures 
Femme recherche femme désespérément.
Par MARTINE SILBER.
20 April 2001
Le Monde
(c) Le Monde, 2001. 

Flavia Company achève sa trilogie sur le désir et les passions impossibles d'un chant d'amour douloureux et déchiran.
Flavia Company est née en 1963 à Buenos Aires mais vit en Espagne depuis l'âge de dix ans. Elle a publié son premier roman, écrit à dix-sept ans, en 1987. Auteur d'essais, de recueils de poésies et de sept autres romans rédigés tantôt en catalan tantôt en castillan, elle vit dans une maison isolée au sud de la Catalogne, donne des cours de littérature, écrit une chronique et des critiques de livres dans les journaux. Donne-moi du plaisir est le dernier volet d'une trilogie (avec Circulos en acibar et Luz de hielo ) consacrée à des romans « intérieurs », autour du désir et des relations impossibles.
Que l'on ne s'y trompe pas: Donne-moi du plaisir n'a rien d'un livre érotique; le titre ne trouve son sens qu'une fois resitué dans le contexte du roman où une phrase revient comme un leitmotiv: « Donne-moi du plaisir et je te donnerai la vie. » Mais la narratrice de ce long monologue, qui s'adresse à un témoin impassible, sans doute son analyste - mais aussi le lecteur - a en quelque sorte perdu la vie en perdant celle qui lui a donné et à qui elle a donné du plaisir. Une passion fulgurante, inattendue qui a commencé le jour où elle a suivi une autre femme dans un grand magasin, et qui la laissera détruite. Elle n'a plus de vie, ni physique ni sociale: elle ne mange plus, ne prend plus soin d'elle, ne travaille plus, n'a plus le goût de rien sinon de ses souvenirs, revivant en boucle cet avant-goût de sa mort annoncée. Peut-être parce qu'elle est née « portègne », Flavia Company a donné à son roman quelque chose de la désespérance, de la nostalgie et de la violence du tango.
Passions mortes, amours perdues et toute la vie foutue. Avec les mêmes phrases qui reviennent comme des idées fixes, mais aussi en refrain et dont on imagine la musique tantôt lente et désespérée tantôt vertigineuse et brutale, et les paroles reprises d'une voix brûlée par les larmes, l'alcool et la fumée des cigarettes: « Dame placer y te daré la vida »; ou bien: « Les occasions ne se présentent pas deux fois, elles ont leur fierté et si vous les ratez, elles ne repassent pas »; ou encore: « Je respire un air qui a un goût de sable ». La construction, le style, le rythme, sont absolument magnifiques et on oublie qu'on lit en traduction, tellement le texte français se coule dans un récit qui raconte si peu en fait. On se laisse emporter par cette tornade de douleur, de folie. « En définitive, on voudrait tout d'un seul coup pour ne rien perdre, alors que pour ne rien perdre, il faut, précisément, avancer pas à pas. Mais c'était impossible de l'aimer lentement ! » Le discours s'enlace sur lui-même - un paragraphe commence souvent par la dernière parole du précédent, provoquant une association d'idées ou faisant surgir une référence, un souvenir... Mais il n'y pas d'histoire à suivre, pas de suspense. Pourtant, la force des mots et de l'écriture est telle qu'on ne peut laisser le livre, on y est pris, pour ce qu'il nous renvoie de nous-mêmes, pour l'envie que l'on peut avoir parfois de vivre une passion qui nous laissera pour morts, sans désir, sans espoir, sans oubli - mais encore en vie. 

Sur un thème assez voisin, Lucia Etxebarria, auteur d' Amour, Prozac et autres curiosités (Denoël, 1999; vient d'être réédité en 10/18), poursuit sa carrière de jeune romancière à succès. Il faut sans doute être soi-même « bobo » (au sens bourgeois bohème, car bobo veut dire stupide en espagnol) pour prendre un vrai plaisir à lire Beatriz et les corps célestes. Le style est souvent trop plat, narratif à l'excès. Mais, quitte à décrire, c'est une bonne description d'une éducation sentimentalo-sexuelle. La narratrice cherche vainement à sauver sa meilleure amie - qui est aussi son premier amour - et à se sauver elle-même, sur fond de parents indifférents et aveugles et de jeunesse bourgeoise, pas encore bohème mais déjà polytoxicomane et prête à toutes les bêtises. 

DONNE-MOI DU PLAISIR, de Flavia Company. Traduit de l'espagnol par Claude Bleton, Flammarion, 170 p.

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